Mack Sennett, de son vrai nom Michael Sinnott, est né le 17 janvier 1880 à Richmond, au Québec, dans une famille d’origine irlandaise. Très jeune, il quitte le Canada pour les États-Unis, où il nourrit le rêve de devenir chanteur d’opéra. Mais c’est finalement le monde du spectacle et du cinéma qui va l’attirer, d’abord comme figurant, puis comme acteur comique à Broadway et à Hollywood. Son sens du rythme et de la comédie visuelle le mèneront à révolutionner le cinéma burlesque.
Installé à New York au début du XXᵉ siècle, Sennett travaille pour la Biograph Company, où il côtoie D.W. Griffith, l’un des pionniers du cinéma narratif. Sous sa direction, il apprend les rouages du tournage, de la mise en scène et du montage. C’est là qu’il découvre l’importance du tempo dans la comédie et qu’il décide de créer un style fondé sur la rapidité, les chutes spectaculaires et les gags visuels — des éléments qui feront bientôt sa marque.
En 1912, il fonde sa propre société de production à Los Angeles : la Keystone Film Company. C’est ici qu’il crée la célèbre troupe des Keystone Cops, policiers maladroits et frénétiques dont les poursuites effrénées deviennent un symbole du burlesque américain. Grâce à ces courts métrages, Mack Sennett devient le roi incontesté de la comédie muette. Ses films attirent un public immense et influencent durablement le cinéma comique.
Sennett a aussi un flair exceptionnel pour repérer les talents. C’est lui qui découvre Charlie Chaplin, alors jeune artiste anglais de music-hall, qu’il fait tourner en 1914 dans Making a Living. Il engage également Mabel Normand, Fatty Arbuckle, Ben Turpin, Harry Langdon et plusieurs autres comédiens qui deviendront des vedettes du burlesque. Il entretient une relation sentimentale avec Mabel Normand, sa muse et héroïne de nombreux films, formant avec elle un duo artistique marquant.
Au fil des années 1920, l’industrie du cinéma évolue rapidement. Sennett tente de s’adapter au passage du muet au parlant, mais ses productions perdent de leur éclat face aux nouvelles comédies sonores. Il ferme son studio en 1935, après plus de deux décennies de succès. Malgré ces difficultés, il reste respecté comme l’un des grands innovateurs du septième art, souvent surnommé « le roi de la comédie ».
Son style reposait sur la vitesse, les cascades absurdes et un humour universel, sans dialogue, accessible à tous les publics. Sennett pensait que la comédie devait être visuelle avant tout : un rire instantané, né du geste, du mouvement et du chaos organisé. Cette philosophie influencera des générations entières de réalisateurs et d’acteurs, de Buster Keaton à Mel Brooks, en passant par les Monty Python.
Dans ses dernières années, il reçoit un Oscar d’honneur en 1938 pour l’ensemble de sa carrière, récompensant son apport à l’histoire du cinéma. Il vit ensuite retiré à Hollywood, écrivant ses mémoires et donnant parfois des conférences sur le cinéma muet et l’évolution du gag visuel. Bien qu’oublié du grand public à la fin de sa vie, il demeure une figure fondatrice du comique à l’écran.
Mack Sennett meurt le 5 novembre 1960 à Los Angeles, à l’âge de quatre-vingts ans. Il est inhumé au Forest Lawn Memorial Park de Glendale, en Californie, l’un des cimetières les plus célèbres de la région, où reposent de nombreuses stars du cinéma classique. Sa tombe, sobre, rend hommage à celui qui fit naître le rire au tout début de l’histoire du film comique.