Vladimir Samoylovich Horowitz naît à Kiev, alors dans l’Empire russe, dans une famille cultivée de confession juive. Son père, ingénieur, et sa mère, pianiste amateur, remarquent très tôt son talent exceptionnel pour la musique. Dès l’enfance, Vladimir reçoit une éducation artistique rigoureuse et se distingue par une mémoire musicale prodigieuse et une oreille absolue qui impressionnent ses professeurs.
Il étudie au Conservatoire de Kiev sous la direction de Felix Blumenfeld, un grand pédagogue qui avait formé plusieurs pianistes de renommée. Horowitz y développe une technique éblouissante et un sens unique du son. Ses premiers concerts en public, encore adolescent, laissent déjà entrevoir un artiste hors du commun, capable de combiner puissance et sensibilité avec une maîtrise totale du clavier.
Dans les années 1920, il quitte la Russie soviétique pour se produire en Europe occidentale. Sa carrière internationale débute véritablement à Hambourg et Berlin, où il triomphe. Ses tournées l’amènent ensuite à Paris et à Londres, où il attire l’attention des critiques pour sa virtuosité et son interprétation visionnaire des grands compositeurs romantiques, notamment Chopin, Liszt et Rachmaninov.
Installé aux États-Unis à partir de 1928, Horowitz fait ses débuts au Carnegie Hall de New York, où son jeu électrise le public. Il collabore avec les plus grands chefs d’orchestre de son temps, tels qu’Arturo Toscanini, dont il épousera la fille, Wanda Toscanini, en 1933. Leur union durera toute la vie, malgré les périodes de tension dues au tempérament hypersensible du pianiste.
Horowitz devient une légende vivante. Ses interprétations de Rachmaninov, Scriabine, Schumann ou Liszt marquent plusieurs générations de musiciens. Il est connu pour ses nuances extrêmes, son toucher lumineux et ses contrastes dynamiques saisissants. Sa personnalité énigmatique, souvent marquée par l’angoisse et les doutes, contribue à son aura presque mythique dans le monde de la musique classique.
Dans les années 1950 et 1960, Horowitz traverse plusieurs retraites volontaires, se coupant du public pendant de longues périodes. Chaque retour sur scène est un événement mondial. Il reste jusqu’à la fin de sa vie un perfectionniste absolu, obsédé par la recherche du son idéal. Ses enregistrements réalisés pour RCA et Deutsche Grammophon comptent parmi les plus célébrés du répertoire pianistique du XXe siècle.
Il revient triomphalement à Moscou en 1986, après plus de soixante ans d’absence, dans un concert historique retransmis à la télévision mondiale. Ce moment symbolique, empreint d’émotion, marque la réconciliation d’un artiste avec sa patrie d’origine et avec lui-même. Son dernier enregistrement en studio, consacré à Mozart et Liszt, témoigne d’une étonnante jeunesse d’esprit et d’une sensibilité toujours intacte.
Vladimir Horowitz s’éteint le 5 novembre 1989 à New York. Il repose au cimetière de Milan, en Italie, dans le caveau de la famille Toscanini, aux côtés de son épouse Wanda. Ce lieu de sépulture, à la fois sobre et chargé d’histoire, symbolise l’union de deux grandes lignées musicales et le repos d’un artiste dont le nom reste indissociable de la perfection pianistique.